.
Moi, Cheeta de James LEVER aux éditions Attila, 22 euros
A ceux qui posséderaient un ego surdimensionné, offrez sans tarder cet irrésistible (auto)biographie d'une superstar hollywoodienne qui a tout vu, tout connu et tout entendu.
A la manière très américaine d'une Stand-up comedy, l'auteur nous invite à revisiter un pan de l'histoire du cinéma avec les yeux du chimpanzé qui incarna Cheeta aux côtés de Johnny Weismuller, dans la saga intitulée Tarzan.
Le merveilleux dans cette histoire est l'absolu contentement de soi du narrateur, grand amoureux de l'espèce humaine en général et de Johnny Weismuller en particulier. Sa carrière, indubitablement, est constellée de succès dus notamment à ses performances comiques. Autodérision ? Pas si sûr car une exceptionnelle lucidité semble gouverner ce récit de la part de quelqu'un qui a "singé" comme personne ses maîtres, ses amis, ses protecteurs.
Outre Johnny, Cheeta en impose beaucoup avec sa pléthore d'ami(e)s, Greta (Garbo), Marlène (Dietrich), Maureen (O'Hara), Ava (Gardner), Carole (Lombard) ou bien Errol (Flynn), Edgar (G. Robinson) David (Niven), soit la fine fleur de l'époque composée (dixit Cheeta) des sept mâles dominants représentant chacun un studio d'Hollywood.
Ainsi les coulisses du cinéma se dévoilent à travers les plateaux de tournages ainsi que les caprices des stars (on y boit beaucoup mais pas seulement ...), les longs intermèdes entre les films où tout le monde se retrouve dans les villas des uns et des autres. Cheeta, aux premières loges, décrit ce mode de vie assez délirant, adoptant lui-même le rythme effréné des amusements de ces éternels enfants.
Plus cabotins que le pire des cabotins, le chimpanzé star ressasse les nombreux tours qu'il a initiés au cinéma, ses invariables saltos arrières, son éternel coup du chapeau, ses cigares inhalés et ses bières ingurgitées mais derrière toutes ces farces et ces bons mots se cache une force de caractère hors du commun, qui colle à l'idée de l'American way of life et du positivisme forcené; et de la survivance aussi car Cheeta n'oublie jamais la chance d'avoir atteint un statut que nul autre de ses congénères n'a jamais obtenu.
Voilà tout l'art de ce livre qui oscille entre la franche rigolade et la menace latente de retourner un jour à une condition animale moins brillante. Cet acteur narrateur, aussi chimpanzé soit-il, est un exemple qui pourrait être décliné à l’ensemble de la profession et qui colle complètement au rêve américain.
La distance utilisée par James Lever dans cet hilarant - quoiqu'on pense - et unique opus de la vie de Cheeta suscite un étonnant trouble identitaire au coeur du cinéma et des studios d'Hollywood, ce paradis monstrueux entre déchéance et nostalgie.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire