samedi 27 février 2016

Auprès de La Fontaine... Fables en haïku

Auprès de La Fontaine... Fables en haïku, par Agnès Domergue et Cécile Hudrisier, éditions Thierry Magnier, 11,50€

Les vacances touchant à leur fin... Et si nous en profitions pour réviser nos classiques ?
Après nous avoir fait jouer avec les contes dans son ouvrage précèdent,  Il était une fois ... Contes en Haïku, Agnès Domergue nous propose ici de redécouvrir les fables de La Fontaine au travers de courts poèmes japonais de trois lignes appelés haïkus, illustrés par Cécile Hudrisier.
En quelques mots et quelques coups de pinceau, les fables, plus ou moins connues, de ce célèbre poète se dévoilent sous nos yeux.
Saurez-vous découvrir quelle fable se cache derrière chaque poème ? 
Exercez-vous sur cet extrait : 
"Dans un poulailler
des lingots d'or gaspillés
pourtant sur la paille !"
Trop simple ? Essayez donc celle-ci :
"Flocon de laine
à la fraîcheur d'un ruisseau
frisson."
La solution ainsi que bien d'autres devinettes vous attendent dans cet album qui réunira petits et grands lecteurs !

Les enfants de l'eau noire de Joe R. LANSDALE

Les enfants de l'eau noire de Joe R. LANSDALE aux éditions Denoël, 21,90 euros.

Inutile de s'attarder sur l’œuvre considérable de Joe R. Lansdale, ce texan écrit depuis l'âge de neuf ans nous dit sa fiche wikipédia. Néanmoins L'arbre à bouteille (paru en 2000) fut pour certains une révélation. Le couple Harp Collins et Léonard Pine formant une paire d'as qui s'est retrouvée à maintes reprises dans les romans de l'américain.

Mais Les enfants de l'eau noire, qui se situe également au Texas  dans les années trente, nous emmène à la campagne qui borde l'état de la Louisiane. Ce décor primordial pour l'histoire répond d'une manière évidente à l’œuvre de Mark Twain, le Mississipi étant remplacé par une petite rivière (la Sabine) où l'on va commencer par remonter un cadavre, celui d'une jeune adolescente, lors d'une partie pêche. 
Il se trouve que sa meilleure amie participe à cette lugubre découverte et la manière dont l'affaire est classée par la police incite la jeune fille à prendre les choses à son compte. D'abord récupérer le corps puis l'incinérer et enfin disperser les cendres à Hollywood, le lieu où la jeune morte avait décidé de se rendre pour y devenir une actrice...

Ainsi l'aventure commence un peu comme si nous avions affaire au club des cinq (qui seront quatre finalement) parti au fil de la Sabine, sur un radeau, avec une flopée de gens malintentionnés à leur trousses. En effet, ils transportent avec eux non seulement l'urne funéraire qui fait suite à la crémation mais aussi un butin découvert par hasard issu d'un braquage qui aurait permis de financer le voyage de la future starlette.

Les membres de cette équipée sont en majeure partie des adolescents, le premier est un bellâtre que les filles n'intéressent pas, la deuxième est une noire qui au pays du sud sait parfaitement à quoi s'en tenir et se défend en conséquence du racisme rampant qui se présente régulièrement à son encontre. Puis, bien sûr, notre petite narratrice, qui a inauguré cette escapade, complète le tableau accompagnée de sa mère sortie d'une léthargie profonde entretenue jusque là par l'alcool et des médicaments qu'elle a longtemps absorbés au-delà du raisonnable. 
Derrière eux, une chasse est organisée  par le beau-père de notre héroïne et par le Shérif en raison de cet argent illégal qui aiguise tous les appétits. Enfin, et vous saurez pourquoi au moment voulu, l'indescriptible Skunk s'invite à son tour dans cette partie de cache-cache. Si beaucoup doute de l'existence de cet homme dont on a fait une légende, ce monstre de la forêt  s'avèrera le clou du spectacle du roman.

Très en verve dans la tête de cette jeune fille de quinze ans, Joe R. Lansdale  a construit avec entrain une farce noire qui alterne les scènes d'action avec de beaux moments de respiration où chaque personnage se révèle autant à lui-même qu'aux autres. 
Voici donc un thriller initiatique d'où se dégage une grande force comique qui comble le frisson et la grande pauvreté morale que l'on côtoie tout au long de cette descente de la Sabine que l'auteur, lui, connaît comme sa poche.

samedi 20 février 2016

Gloire tardive d'Arthur SCHNITZLER

Gloire tardive d'Arthur SCHNITZLER aux éditions Albin Michel, 16.00 euros

Il y a dans la vie certaines choses qui arrivent trop tard, des choses que l'on n'attendait plus et qui, lorsqu'elles arrivent, ne sont peut-être plus opportunes. Voilà sur quoi repose la longue et inédite (tardive ?) nouvelle du maître autrichien, auteur de Mademoiselle Else, La rondeVienne au crépuscule etc.

Gloire tardive pourrait bien être le prolongement de cette confidence relevée dans le journal de Schnitzler :
"Si seulement j'étais artiste autant que le voudrait ma nature d'artiste,... mon avenir sera : devenir un médecin moyen !".

Cette trajectoire que Schnitzler n'a pas tout a fait empruntée, s'accomplit en revanche pleinement pour Edouard Saxberger qui endosse en l’occurrence la profession vague de fonctionnaire en attente d'une proche retraite.

Saxberger a des habitudes  profondément ancrées dans un café viennois où il se délecte de parties de billard (qu'il arbitre seulement) et de quelques ballades qui clôturent ses journées avant qu'il ne regagne son appartement de vieux célibataire.

C'est au retour de l'une d'elles qu'une surprise se produit, un jeune homme se présente à lui et le renvoie en quelques phrases au poète que fut Saxeberger en ses jeunes années lorsqu'il revendiquait un recueil poésie intitulée Les promenades, qu'il pensait, depuis le temps, irréversiblement oublié.
Il constate avec stupéfaction la vénération entretenue autour de sa personne par le jeune homme mais encore, lui dit-il, par un cercle d'admirateurs dont il n'est qu'un représentant.

 Voilà de quoi surprendre plus qu'agréablement notre fonctionnaire qui accepte d'un même élan ces compliments soudains ainsi que l'invitation qui lui est faite de se présenter aux autres membres de cette jeune académie qui a ses habitudes, elle aussi, dans un café.

La modestie du poète est dès lors mise à mal devant la reconnaissance enthousiaste de ces nouveaux amis. Il devient même difficile à Saxberger de donner son opinion sur la production poétique de ces jeunes comparses. Un tourbillon l'emporte, la tentation d'exploiter ce début de notoriété l'égare, Saxberger se sent rajeunir quitte à laisser une part de lucidité.

L'immense plaisir que l'on prend à la lecture de Gloire tardive tient à ce que, tout compte fait, le grand Claudio Magris parvient  à résumer admirablement en une phrase :
"Arthur Schnitzler ressuscite tout le charme mozartien de la culture autrichienne... le brio souriant et la mélancolie légère."

Mais où est donc Ornicar?

Mais où est donc Ornicar? + de 100 moyens mnémotechniques d'Elisabeth Marrou et Ben Bouchet, éditions Deux Coqs d'Or, 11.95 euros ( à partir de 7 ans)

Voilà un livre comme on les aime: pratique, astucieux et qui simplifie la vie! Alors, disons-le tout de suite, quand nous précisons "à partir de 7 ans", c'est parce que c'est effectivement l'âge consensuel pour un tel livre mais honnêtement, les 17 , 27 , 37 , 47 ans... peuvent aussi venir acheter ce livre sans prétexter que c'est pour leur enfant, on ne se moquera pas!
Grâce à lui, tout devient facile: outre le célèbre "Mais où est donc Ornicar?" que tout le monde connaît, vous saurez désormais à coup sûr que:
- l'Arctique est au pôle Nord et que l'Antarctique est au pôle Sud (et oui bien sûr: "Arctique": 8 lettres, il est plus léger donc il flotte en haut de la carte au pôle Nord; "Antarctique": 11 lettres, il est plus lourd donc il coule en bas de la carte au pôle Sud!
- Même système pour le tropique du Cancer (6 lettres) qui flotte, il est donc au Nord alors que le tropique du Capricorne (10 lettres) coule au Sud!
- l'ordre des planètes en partant de la plus proche du Soleil? Aucun problème: "Me voilà tout mouillé, j'ai suivi un nuage" ce qui donne évidemment Mercure, Vénus, Terre, Mars, Jupiter, Saturne, Uranus, Neptune!
- et on ne résiste pas à une petite dernière: "Octobre recule et avril avance" ainsi plus moyen d'arriver en retard ou en avance au boulot lors des changements d'heure: en octobre (ou autre mois de l'hiver) on recule d'une heure, en avril (ou autre mois du printemps) on avance d'un heure.
Et ce ne sont que des exemples picorés dans cet ouvrage aux thématiques aussi diverses que les animaux, l'art et la littérature, les mathématiques, le français, l'histoire, les sciences, la vie quotidienne et la géographie: on vous dit, vous allez l'adorer!

Rencontre Polar

Date : 27/02/2016
Heure : 11h00
Lieu : Médiathèque Michel Bézian, Gujan-Mestras

Entrée gratuite. 



 


Hervé LE CORRE et Yan LESPOUX présentent les nouveautés « Romans Noirs ».

Entrée Gratuite.

Réservations conseillées, jauge limitée.
Renseignements Médiathèque Michel Bézian 05 57 52 54 60.


samedi 13 février 2016

Ah l'Amour....!

A la veille de la fête la plus attendue par les amoureux (= la Saint Valentin pour les autres), on ne peut que constater que nos petits héros eux aussi ont un petit cœur qui bat très très fort. Voici un petit florilège des amoureux et amoureuses de la librairie (attention, liste non exhaustive!): 

T'choupi est amoureux de Thierry Courtin, éditions Nathan, 5.70 euros
Sans conteste THE best-seller des tout-petits (3/6 ans)! T'choupi et Nina adorent jouer ensemble, même si Pilou se moque un peu d'eux : «Oh les z'amoureux !» crie-t-il tout le temps. Mais quand Nina reçoit un dessin de T'choupi, elle lui fait un bisou et là il n'y a rien de plus magique pour notre T'choupi!

Lili est amoureuse de D. de Saint Mars et Serge Bloch, éditions Calligram, 4.90 euros
Lili et Hugo sont amoureux, mais le jour où il faut le dire devant tout le monde, ça se complique... Le bonheur qui donne des ailes, la jalousie, la peur de ne pas plaire ou d'être trahi, le sentiment amoureux est ici abordé avec tout l'humour et la profondeur qui font tout le succès de cette collection des Max et Lili bien connue des plus jeunes. (Et parce que l'amour peut parfois être suivi de déceptions, sachez que Lili a un chagrin d'amour existe aussi...).

Coup de foudre au poulailler de Christian Jolibois et Christian Heinrich, éditions Pocket Jeunesse, 4.90 euros (5/7 ans)
Mais qu'arrive-t-il à Carmélito ? Il a soudain son petit cœur qui s'affole et les pattes qui flageolent. Il perd complètement la boussole ! Le petit poulet rose couverait-il quelque chose ? Sa sœur Carmen, elle, se demande si l'arrivée de Roxane, une jolie poulette rousse, ne serait pas la cause de l'étrange maladie de Carmélito... 
 
Le buveur d'encre qui écrivait des mots d'amour d'Eric Sanvoisin et Olivier Latyk, éditions Nathan, 5.70 euros (7 ans)
Draculivre est amoureux. mais ses méthodes de séduction sont un peu datées. Il n'arrive pas à exprimer ses sentiments. Pour l'aider, Carmilla et Odilon vont réinventer la scène du balcon en s'inspirant de Roméo et Juliette, et forcent leur oncle à se montrer à sa dulcinée et même à écrire un slam d'amour !
 
 Ratus à la fête des amoureux de Jeanine et Jean Guion et Olivier Vogel, éditions Hatier Jeunesse, 4.20 euros (7/8 ans)
Qui sera la reine, à la fête des amoureux ? Tous les élèves voudraient que ce soit Jeannette, leur maîtresse, mais elle n'a pas d'amoureux ! Pas de problème, dit Ratus, on va lui en trouver un ! Ses copains sont ravis et une folle aventure commence... 
 
 Le chat assassin tombe amoureux d'Anne Fine et Véronique Deiss, éditions Ecole des Loisirs, 8.70 euros (à partir de 7 ans)
Après Chien pourri est amoureux, c'est au tour de notre ami le chat assassin de se sentir pousser des ailes même si pour lui l'Amour c'est pour les nuls et ça rend bête....!

Le loup qui cherchait une amoureuse d'Orianne Lallemand et Eléonore Thuillier, éditions Auzou, 5.95 euros (3/6 ans)
Il était une fois un gros loup noir, plutôt mignon, plutôt gentil, mais qui n'avait pas d'amoureuse. Un jour, il décida d'en trouver une. Mais comment savoir si c'était bien la louve de sa vie ? Facile ! Quand il la verra, il aura les jambes flagada, la cervelle en chocolat et le coeur qui bat !

Splat est amoureux de Rob Scotton, éditions Nathan, 13.90 euros, (3/6 ans)
C'est la St-Valentin : Splat a préparé une carte toute spéciale pour une chatte blanche toute spéciale pour lui : Kattie. Mais Splat ne sait pas trop s'il doit donner cette carte ; à chaque fois, qu'elle le voit, Kattie le taquine, l'embête, lui tire les moustaches ! En plus, Grouf, un autre chat de la classe a écrit une immense carte pour Kattie. Splat se trouve bien ridicule avec sa toute petite enveloppe...

Changer d'air de Marion GUILLOT

Changer d’air de Marion Guillot aux éditions de Minuit

Que devient l’école de Minuit ? Où en est cette précieuse maison dont on n'ose presque plus évoquer les grandes figures qui sont pourtant immuables. Citons Beckett, Duras, Simon et Sarraute, des piliers de Minuit mais aussi des représentants majeurs de la deuxième moitié du XXème siècle. On peut toujours discuter la pérennité de leur œuvre mais ces auteurs ont bâti les fondations de la maison et ont donné l’assurance d’une qualité d’écriture que l’on peine à retrouver ailleurs sur une pareille durée.

La disparition de Jérôme Lindon (directeur de 1948 à sa mort en 2001) et l’héritage assuré par sa fille Irène ont modifié forcément son histoire mais celle-ci continue avec Jean Echenoz notamment, le dernier prix Goncourt de Minuit (1999), brillante tête de gondole à qui l’on doit d’ailleurs un récent roman qui rassure sur son état de forme et le conforte dans son rôle (non assumé) de commandeur, non seulement des éditions de Minuit mais des lettres françaises dans leur ensemble, n’en déplaise à Michel Houellebecq.

A ses côtés, Jean-Philippe Toussaint, Laurent Mauvignier, Yves Ravey voire Eric Chevillard côtoient dignement le « maître » ayant chacun acquis une cohorte d’admirateurs qui attendent avec impatience une prochaine parution.
Cette génération d’auteurs qui a succédé avec les honneurs aux grands aînés est désormais suivie d’une nouvelle aux accents prometteurs, encore faut-il prendre la peine de la découvrir et de la soutenir.
Julia Deck et Vincent Almendros avec une petite préférence pour ce dernier sont d’incontestables héritiers mais voici qu’une nouvelle venue vient renforcer cette délégation. Elle se nomme Marion Guillot et  la sonorité de la « petite » Guillot est, à maints égards, très intéressante.

Nous savons depuis longtemps que l’histoire du roman est truffée de héros qui n'en sont pas. Ils sont même légion depuis, voyons voir, Laurence Sterne, Miguel de Cervantes, Robert Musil… N’écrasons pas celui que vient de créer Marion Guillot, considérons cependant qu’il a une particularité bien à lui, celle de l’abandon.
Tel un coureur cycliste (ayant peut-être pris de mauvais produits) qui mettrait, contre toute attente, pied à terre au troisième ou quatrième lacet d’un col, le personnage de Changer d’air s’arrête. Pensant que sa vie n’a plus de sens, il quitte la scène sociale où nous ne l’avons d'ailleurs jamais vu évoluer. C’est le début.

Ce déclic lui est parvenu lors de la chute spectaculaire d’une femme dans les eaux du port de la ville (Lorient ?), chute  dont il a été un témoin passif.
De cette situation humiliante et ridicule une brèche s'est ouverte dans la vie de notre cycliste qui est en fait un professeur de collège, marié et père de deux enfants.
Calmement, sereinement presque, il annonce son éloignement du domicile conjugal, son installation dans une autre ville (Nantes ?) et la cessation de son activité professionnelle.

Ainsi assistons-nous à cet arrêt, une mise au point mort de la vie de quelqu'un qui ne souhaite pas se relancer, pas dans l’immédiat. Il entame plutôt une observation aigüe des gens (la déambulation par exemple des voyageurs dans les gares..) mais aussi de son nouvel appartement (sa nouveauté, sa vacuité, les possibilités de l’améliorer) et pour finir des gesticulations vaines de ce poisson rouge dont il a fait l'acquisition,  histoire de combler sa solitude. Restent encore les échanges ubuesques avec son seul et meilleur ami qui seront plus tard marqués du sceau de la trahison.
         
Le discours de cet étrange personnage nous apprend quelles préoccupations parfois infimes et souvent futiles le paralysent. Tout cela pourrait à son tour tenir dans un bocal avec le risque de mourir asphyxié (ce qui arrivera au poisson) s’il advenait d’en sortir.
Cette sonorité très originale (répétons-le) qui se dégage de l’écriture de Marion Guillot, se prête parfaitement à l’appel lointain d’une personne perdue, l’appel d’une sirène peut-être car l’élément aquatique est omniprésent bien que contradictoire avec le titre.
Mais Changer d’air équivaut d'abord à quitter son environnement pour un autre et réclame une adaptation que notre (anti) héros sent impossible à atteindre.

La fin est heureuse, belle et touchante. Il faut la laisser venir et découvrir la subtilité qui habite chacun des protagonistes ainsi que le mélo amoureux qui en découle car finalement la dépression atmosphérique qui s’est abattue sur notre homme avait pour origine un sentiment perdu, que Marion Guillot aurait toutes les raisons d'approfondir à l'occasion de ces prochains livres puisque celui-ci était son premier.

vendredi 5 février 2016

Le remplacement de François GARCIA

Le remplacement de François GARCIA aux éditions Verdier, 15,50 euros.

Paco Lorca, le personnage central du Remplacement est un alter ego littéraire de François Garcia qui est  apparu dans un autre roman intitulé Bleu ciel et or, cravate noire. Il s'agissait d'une odyssée inédite dans l'Espagne tauromachique des années 70, aventures réellement vécues par l'auteur.

Hélas pour lui, la destinée de Paco Lorca a pris dans Le remplacement une direction plus au nord; au terrain sec espagnol a succédé l'humidité plutôt froide des marais, et de torero en herbe le voici devenu médecin fraîchement émoulu de la faculté. Ce nouveau statut l'expédie en urgence, dès les premières pages, dans une ferme où il se doit d’effectuer une mission ardue : remplacer le docteur Gloirafeux en congé maladie et se faire accepter par les habitants.

Une simca1000 légendaire qui a remplacé la 4L vacillante de l'épisode précédent sert de Rossinante au docteur dans ses déplacements de campagne comme de ville. Quant à Hélène, la dulcinée du Paco torero, elle hante désormais les pensées du docteur Lorca. Ses apparitions comme ses disparitions pèsent sur le moral de notre exilé qui découvre dans le même temps que les activités politiques de son aimée se sont déplacées sur un terrain dangereux.

La politique est d'ailleurs l'autre grand sujet du Remplacement (aux côtés de la médecine bien sûr).
Nous sommes au temps du giscardisme triomphant qui subit les premiers assauts de la crise pétrolière. On se répand allègrement dans les chaumières du village, Clochemerle n'est pas loin attisé par la rumeur une visite présidentielle chez l'habitant imminente.
François Garcia ne se gêne pas pour nous gratifier de quelques scènes d'anthologie tandis que son alter ego   slalome d'une confession à l'autre recueillie bien malgré lui auprès de ses patients. Rancunes, scandales,  et tromperies, tout y passe. Le docteur, pris entre deux feux, exerce, soulage, guérit, diagnostique et au final se confronte à la misère d'une population engluée aux confins des marais.

En alternance avec cette campagne où les urgences doivent parfois être traitées par bateau, le docteur Lorca est rattaché au service hospitalier de la grande ville. Dans les couloirs et les chambres aseptisés, il cohabite avec des confrères qui, là encore, et par d'autres moyens, le désappointent.

Cette vie tumultueuse, à la fois lointaine et  proche dans le temps, nous saisit. Ce moment revisité et condensé des mœurs françaises est un instant clé qui voit s'éteindre le règne des trente glorieuses. Ainsi, Le Remplacement ausculte cette part de mémoire collective assez peu traité dans le roman français et François Garcia réussit là parfaitement son tableau, sa langue est d'une justesse éblouissante, elle agit comme un filtre et le registre large et varié des voix qu'il utilise conforte toute la puissance et la maîtrise de son style.


Histoires d'Ours

Satanés lapins de Ciara Floof, éditions Circonflexe, 13 euros (à partir de 4 ans):
Qu'il est bon d'être tout seul, tranquille dans son petit chez soi au milieu de nulle part pour M.Ours... oui mais voilà c'est sans compter sur ses nouveaux voisins, une famille d'adorables lapins qui a très envie de faire connaissance avec notre Monsieur légèrement grincheux. Les "Oust" sur le paillasson, les "ne pas sonner" au dessus de la sonnette, les regards méchants n'y feront rien, nos lapins feront tout pour avoir un nouvel ami et finalement leur côté envahissant pourrait bien manquer à celui qui voulait qu'on le laisse tranquille...
Un bel album plein d'humour et aux dessins tendres qui ravira les plus jeunes!

L'ours qui jouait du piano de David Litchfield, éditions Belin Jeunesse, 12.90 euros (à partir de 6 ans):
Quelle ne fut pas la surprise de l'ours de découvrir un jour en pleine forêt une étrange boîte qui faisait des bruits bizarres. Les semaines, les saisons, les années passent et l'ours apprivoise chaque jour un peu plus cette chose dont les sons deviennent de plus en plus mélodieux et doux aux oreilles de ses amis ours qui restent maintenant des heures à l'écouter.  Le bonheur semble si simple mais les lumières de Broadway vont lui aussi l'attirer quand deux humains le découvrent un jour par hasard. Salles combles, articles prestigieux dans les journaux, récompenses en cascade, l'ours a tout pour être heureux sauf que non, bien sûr, il ne l'est pas; bien sûr ses amis lui manquent mais après tout ce temps ne l'ont-ils pas tout simplement oublié?
Comme il est écrit sur la quatrième de couverture: "Une histoire d'ours et de vie rêvée qui célèbre la musique et la force de l'amitié".

Rencontre de Franck Maubert au Lycee Grand Air

Un très grand merci aux élèves du Lycée Grand Air, à leurs professeurs Mme Eva et Mme Tonnellier pour l'accueil chaleureux qu'ils ont réservé à Franck Maubert, venu hier à leur rencontre pour leur parler de l’œuvre d'Alberto Giacometti à travers son dernier livre L'homme qui marche. Leur enthousiasme était tel qu'ils se sont admirablement emparés du projet en réalisant en l'espace de quelques semaines des œuvres toutes plus réussies les unes que les autres reflétant parfaitement le travail de l'artiste. Vraiment toutes nos félicitations à eux!