La Capitana d'Elsa Osario, traduit de l'espagnol (Argentine) par François Gaudry, éditions Métailié, 20 euros.
C'est une figure discrète et lumineuse du mouvement révolutionnaire du XXème siècle que fait revivre l'écrivaine argentine Elsa Osario.
Et d'abord quelques éléments de sa vie: elle s'appelait Micaela Feldman, était, comme sa biographe, née en Argentine. Issue d'une famille juive ayant fui les pogroms de l'époque tsariste en Russie, elle acquiert très jeune une conscience politique, proche du mouvement anarchiste et admiratrice de Louise Michel; se frottant à la toute puissance du mouvement communiste après la révolution bolchévique, elle a d'emblée pris ses distances avec lui; et ce, dès le début des années 20 (elle était née en 1902). Ardente et déterminée dans son activité militante, d'abord dans son pays, puis sur le continent européen en 1931, avec son compagnon Hipolito Etchébéhère, elle a le parcours commun à beaucoup de ceux qu'on appela les opposants de gauche à l'internationale communiste.
C'est surtout sa participation à la guerre civile espagnole qui est rappelée et magnifiée dans le roman: seule femme commandante d'une brigade pendant tout le conflit, elle s'illustra non seulement par ses actions héroïques mais aussi par la manière dont, "capitana" d'un groupe de miliciens, elle sut gérer d'une manière forte et originale l'essence même de l'acte de commander.
Cette voix, Elsa Osario nous la restitue avec tout son original talent de romancière: le livre est subtilement agencé, allant d'une époque à l'autre de la vie de Micaela, construisant et déconstruisant la chronologie pour en souligner les lignes de force. Comme dans Luz ou le temps sauvage, l'écrivaine fonde, dans son récit souvent polyphonique, une espèce de récitation-respiration où l'émotion, l'empathie sont palpables. L'admiration et la tendresse pour son personnage le sont également.
Bernard Daguerre
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