La succession de Jean-Paul DUBOIS aux éditions de l’Olivier, 19 euros.
L’oeuvre de Jean-Paul Dubois, à ce jour, ne s’est jamais révélée particulièrement optimiste, quel que soit le sujet traité. Cela ne veut pas dire que sa prose soit ennuyeuse, ni triste, enfin, pas tout le temps.
Cette fois, La sucession aborde quelques questions que la plupart des vivants -que nous sommes- esquive volontiers. Comment finir ses jours, par exemple, est une préoccupation que Paul Katrakilis traitera dans les toutes dernières pages du livre bien que nous sentions venir ce problème de loin dès lors que l’annonce de la mort du père déboule depuis Toulouse vers Miami où Paul officie en tant que joueur de Cesta Punta professionnel.
A ce moment-là, Paul a moins de trente ans, sa vie ressemble au voeu le plus cher qu’il avait formulé à la fin de son enfance lorsqu’il découvrit la pelote basque du côté d’Hendaye et de Saint-Jean de Luz. Il a adopté un mode de vie un brin marginal en pratiquant un sport que peu de gens connaissent voire comprennent. Dans une ville où quelques clichés suffisent à comprendre que l’on y vit plutôt bien et, à un âge où la part d’insouciance est encore considérable, l’annonce de cette mort du père va définitivement gripper cette vie mécanique (auto/bateau) et entamer la descente du piédestal où sa quête hédoniste l’avait mené.
Mais Paul ne se présente pas pour autant comme un imbécile ni comme quelqu’un d'antipathique. Des signes bien précis d’homme de goût nous font apprécier cette vie de célibataire et rappellent au passage l’emprise journalistique, sur le roman, du style de Jean-Paul Dubois qui travailla longtemps pour le Nouvel Observateur.
De retour à Toulouse où il vécut enfant, Paul Katrakilis découvre des pans inconnus de la vie de son père avant que celui-ci ne choisisse de se donner la mort du haut d’un immeuble de huit étages. Adrian Katrakilis était sans doute bien plus complexe que son fils mais nous allons nous sentir, malgré tout, suffisamment proches de ce dernier pour suivre sans ennui les quinze années qui vont suivre la mort de ce père si spécial. Ayant suivi des études de médecine, Paul peut reprendre, pour un temps, le cabinet paternel.
La chronique familiale va donc se poursuivre et révéler les différentes destinées de la famille Katrakilis ainsi que celle des Galliani, le nom de jeune fille de la mère de Paul. S'ensuit une très belle immersion dans le Pays Basque lorsque Paul retourne sur les lieux où il fut recruté pour aller jouer en tant que professionnel en Floride. De ce fait, nous ferons plus ample connaissance avec Joey « Nervioso » Epifanio, son coéquipier de pelote basque et, plus tard, Paul nous contera l'histoire d’amour qu'il vécut avec Ingvild Lunde, une plantureuse norvégienne bien plus âgée que lui. D’autres personnages s’inscriront encore, à intervalles réguliers, dans la vie de Paul : Watson, le chien qu’il sauva de la noyade, Spyridon, le grand père qui côtoya Staline, Zygbi, le chirurgien alcoolique, Lazlo Papp, le recruteur de pelote basque sosie de Joe Pesci, sans compter la Triumph Vitesse MK2 de 1969 et le dernier des quagga…
Le catalogue de Jean-Paul Dubois, nous le voyons, est bien plus vaste qu'il n'y parait. Il supplante heureusement le funeste destin qui se profile dans la vie de Paul comme si, raconter, pour la route, une dernière histoire, était, tout compte fait, toujours bon à prendre.