On a beaucoup parlé de ce livre bien avant sa parution. Accepté puis refusé chez Gallimard, le roman de Pierre Mérot avait été programmé dans la rentrée Stock par Jean-Marc Roberts puis déprogrammé par son successeur Manuel Carcassonne qui l’avait déjà refusé chez Grasset. Finalement le livre vient de paraitre chez Flammarion entaché d’une réputation sulfureuse. Voila pour la cuisine éditoriale.
Alors , de quoi s’agit-il exactement ? Du portrait d’une ordure ! Cinquante ans, Jean Valmore, le narrateur, enseignant médiocre, écrivain raté et non publié bascule peu à peu dans la haine et la violence, vire fasciste et s’inscrit dans un parti d’extrême droite. Les premières lignes donnent le ton : « Au fond, jusque-là, ce qui m’avait manqué, c’était de n’avoir pas pris conscience que j’étais une saine pourriture ou, plus banalement, comme beaucoup d’autres, une personne activement immorale, opportuniste, avide, terrestre, se foutant pas mal de ses semblables, douée d’indifférence ou de mépris à leur égard, prête à les écraser pour jouir, faire de l’argent, obtenir des distinctions ou une position dominante quelle qu’elle soit. Oui, à cinquante ans, il était temps que je songe activement à moi, à moi seul ».
L’auteur décrit les mécanismes qui peuvent conduire un homme à rejoindre un parti fasciste qui, s’il n’est pas cité, est clairement le Front National. La haine de soi entraine celle des autres. Parfois brillant dans le portrait, le livre souffre néanmoins d’être trop monochrome et manque de densité. La charge frise parfois le loufoque même si hélas des êtres aussi immondes existent. A trop vouloir forcer le trait, on a la sensation que Pierre Mérot est passé à coté d’un grand livre. Il est vrai que décrire toute la noirceur du monde après Céline, Houellebecq ou bien d’autres, n’est pas chose aisée.
Olivier de Marc