Kalooki nights d’Howard JACOBSON aux éditions Calmann Lévy, 22.50 euros.
Kalooki désigne une partie de cartes plus ou moins éloignée du jeu de rami et pourrait servir d’ascenseur comme pour rejoindre une mine. Cela nous enverrait dans les tréfonds de la terre pour en extraire du métal, un minerai, quelque chose de précieux mais aussi dans un dédale, un endroit peu éclairé et peu rassurant, un endroit où des catastrophes sont souvent survenues. La mine dans laquelle Kalooki nous expédie est le monde juif, la judéité, richesse précieuse de l’humanité.
Howard Jacobson, guide de cet univers dont il semble être également le démiurge, a choisi Manchester en Angleterre et un certain Max Glickman, témoin et acteur, à l’intelligence et l’humour cinglant, pour élucider une affaire dans laquelle tout le monde est empêtré. En effet, un crime a été commis par l’ami d’enfance de Max, l’inénarrable Manny qui a purgé vingt ans de prison mais dont personne n’a compris les raisons qui l’ont poussé à l’acte ignominieux du gazage de ses parents.
Les juifs vivent en famille, grandissent en famille et meurent en famille, voilà comment on pourrait abruptement résumer Kalooki nights. Mais ce serait ne pas comprendre l’écartèlement intérieur des protagonistes de cette histoire qui tentent de s’émanciper du destin juif. Max, par exemple, épousant en vain des femmes non juives.
Les années cinquante, cadre magnifique de l’enfance de Max qui, depuis l’Angleterre, l’épargnèrent d’un point de vue géographique sans pour autant lui éviter d’innombrables questions quant à l’ébranlement que provoqua la Shoah, font échos aux années deux mille et au resurgissement de Manny ainsi que d’un enrobage inextricable du tissu familial fabuleusement drôle. Ainsi nous profitons avec ce livre obsédant d’une visite inopinée dans les méandres d’un peuple qui dit de lui-même n’avoir jamais cessé de se définir.
Si la quatrième de couverture prétend qu’Howard Jacobson est le Philip Roth anglais, alors souhaitons-lui une égale sinon supérieure reconnaissance.
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