jeudi 31 décembre 2020

Nature humaine de Serge Joncour

Nature humaine de Serge Joncour, éditions Flammarion, 21 euros

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Le 3 juillet 1976, "c'était bien la première fois que la nature tapait du poing sur la table". Dans le Lot, la ferme familiale où vivent Alexandre, ses parents et ses sœurs, s'apprête à vivre une canicule sans précédent. Bien plus tard, en décembre 1999, les vents se déchaîneront. Dans le dernier roman de Serge Joncour, l'heure de la discorde a sonné entre l'Homme et son environnement.

Certains ferment les yeux, comme les parents d'Alexandre, prêts à adapter leur métier au monde modernisé, le plus important étant de faire perdurer la ferme des Bertranges. D'autres se révoltent comme le père Crayssac, prêt à tout pour empêcher l'installation d'une ligne téléphonique devant chez lui, (quitte à affronter les forces de l'ordre), et les nouveaux amis d'Alexandre, proches du mouvement ETA. A la télévision, on parle de centrales nucléaires et de la construction d'une autoroute non loin de ce paysage en danger. Le vivant s'incarne dans les villes et quitte peu à peu les campagnes. Les sœurs d'Alexandre l'ont compris, et prennent la liberté d'aller faire leurs études sur Toulouse, rassurées de pouvoir compter sur leur frère pour "prendre la suite". La suite, elle, ne se passera pas comme prévu. Alexandre tombe amoureux, souhaite devenir un autre que celui qu'on attend.

Il serait pourtant dommage de réduire le roman de Serge Joncour à une histoire d' amour, Nature humaine pouvant se lire à des niveaux différents. Véritable portrait de la France des années 80, roman d'une campagne bouleversée, d'une jeunesse galvanisée par l’élection de François Mitterand, Nature humaine dépasse aussi cette décennie grâce à la richesse du personnage d'Alexandre. Ce dernier, tantôt sujet discipliné effectuant les travaux de la terre, tantôt attiré par l'inconnu et la déviance, est un homme dont l'histoire est dressée avec une densité remarquable. S'il n'est plus question d'amour il est question de cœur, balancé entre sagesse et folie dans un monde ou règnent la surconsommation et le désir de toute puissance. Une chose est sûre, la terre est précieuse, Alexandre l'a compris, tout comme l'auteur de ce grand roman de la rentrée. Espérons que les nombreux lecteurs du prix Femina le comprendront aussi!

 





 

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