Comme les amours de Javier MARIAS aux éditions Gallimard, 22,50 euros.
Les romans de Javier Marias ont une
progression narrative très particulière qui fait office de frein et
empêche toute précipitation à la compréhension psychologique de l’âme
humaine. Maître Marias s’attache à des histoires qui peuvent mettre à
l’épreuve l’impatience du lecteur mais celle-ci est contrecarrée par une
nonchalance qui se déploie autour d’un abîme avec lequel le romancier
madrilène joue tel le chat avec la souris.
L’observation d’un couple à l’apparence
heureuse par une jeune femme installée dans un café déclenche le discours
de celle-ci. A distance, elle se repaît de l’amour serein qui se dégage
de ces amoureux dont elle se croit invisible et qui, à son insu, la
surnomme « la jeune prudente ». Cette retenue, décidée par l’auteur,
préserve la jeune femme au moment où le couple dont elle envie le
bonheur va sombrer dans la tragédie. En effet, la mort soudaine et
incompréhensible du mari va mêler cette spectatrice/narratrice au plus
près de l’épouvantable destin du couple par le côtoiement de celui qui a
peut-être tout ordonné en un « assassinat, pas davantage ».
Cette citation tirée des Trois mousquetaires
d’Alexandre Dumas est une justification trouble et sidérante dont
s’accommode le meurtrier qui désormais occupe toutes les pensées de la
jeune femme car les raisons de son crime sont évidemment plus
passionnante que le crime lui-même.
De cette odyssée profonde le lecteur
ressort marqué et néanmoins heureux d’avoir vogué sur les phrases d’un
des écrivains les plus charmeurs de notre temps.
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