lundi 15 août 2016

SELECTION LE PRIX D'UNE VIE / LE PARISIEN MAGAZINE : Vincent qu'on assassine

SELECTION LE PRIX D'UNE VIE / LE PARISIEN MAGAZINE :Vincent qu’on assassine de Marianne JAEGLE aux éditions de l’Arpenteur, 16 euros.

Vincent Van Gogh dont chacun sait la maudite vie qu’il vécut,  commence par ressusciter le temps de quelques trois cent pages écrites avec conviction par Marianne Jaeglé.  Cette agrégée de lettres modernes s’est imprégnée, via la correspondance du peintre, du mal-être chronique du génie hollandais au moment où celui-ci s’apprête à accueillir Paul Gauguin dans sa maison jaune en Provence. 

Van Gogh se fait une joie d’ébaucher une entente cordiale avec un peintre qu’il admire. Il est parvenu à le soustraire de Pont-Aven où Gauguin avec Emile Bernard (et d’autres) ont créé un élan artistique pour une nouvelle peinture. Seulement Van Gogh n’aurait jamais eu droit à l’honneur de cette présence si son frère Théo n’allouait pas à Gauguin une pension mensuelle de cent cinquante francs. Gauguin et Van Gogh cohabiteront quelques temps jusqu’au soir terrible et confus de l’oreille coupée. Vincent Van Gogh maladroit en tout sauf en peinture entame alors un  chemin de croix qui durera deux ans. Arles, Saint Rémy, Auvers sur Oise sont les trois stations qui lui restent avant que ne survienne le coup de feu qui décidera de sa mort.

Ce Vincent Van Gogh nous touche dans le dédale artistique où il se débat. Il ne semble pas plus sûr de son art que de ses relations amicales qui semblent toujours finir en « eau de boudin » comme l’avait prédit son oncle Cent. Mais la malédiction du peintre a peut-être débuté par la mort prématurée d’un frère nommé Vincent, un an avant sa propre naissance. Le souvenir de la tombe de ce frère devant laquelle ses parents et lui-même venaient se recueillir provoqua l’étrange impression de voir son propre nom gravé sur une tombe.

L’entreprise de Marianne Jaeglé de rendre vie à Vincent Van Gogh est pleinement réussie. Les atermoiements de Gauguin, le soutien inconditionnel de Théo participent à la reconstitution fatidique qui nous emmène sur le lieu du crime tel que l’atteste Marianne Jaeglé dans sa version romancée. Vincent qu’on assassine, outre la contestation du suicide de Van Gogh, est une admirable compréhension de l’œuvre du peintre et du contexte dans lequel celle-ci est advenue sans toutefois rencontrer le succès qu’elle méritait. 

La considérable voire l’incompréhensible spéculation contemporaine qui touche tout ce que Van Gogh a produit ajoute à cette lecture une émotion infinie et une interrogation sur l’art vu sous un de ses plus mauvais jour.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire