Il peut tout arriver entre deux pins biscornus, sur une plage balayée par les vents, ou encore dans l'océan déchaîné. Le meilleur comme le pire. Ici, dans les nouvelles magistrales de Yan Lespoux, on s'oriente plutôt vers le pire. Chaque personnage, abîmé ou presque, trouve une issue de secours dans cet environnement naturel, chargé d'Histoire, de traditions et de cultures. Issue qui peut s'avérer cocasse, imprévue, burlesque ou cauchemardesque. Portraits de gens du Médoc et d' "étrangers" venus sur leur terre, les nouvelles de Presqu'îles sentent la résine, le champignon fièrement récolté, la chasse des dimanches pluvieux. Elles sentent aussi la nostalgie de l'enfance, les magouilles de l'adolescence, la déprime de l'âge adulte, et la dérive des sentiments.
L'hostilité vient de la nature, lorsque l'océan emporte la vie dans ses baïnes, mais elle vient surtout des hommes. Les personnages de Yan Lespoux commencent leur journée par la rubrique faits-divers du journal Sud-Ouest. On peut y lire le récit d'un cambriolage d'une quincaillerie, celui d'une pêche illégale, d'une culture de cannabis au milieu d'une pinède, ou encore d' un contrôle de police qui a (très) mal tourné.
On n'y lira pas, en revanche, la solitude des hommes, l'isolement et la peur. On y lira pas non plus ces traditions dont les gens veulent se défaire, ou au contraire qu'ils affichent corps et âme pour rester en vie. Entre les nouvelles, le lecteur prend une grande inspiration, sourit, voit passer ces âmes seules dans des tracteurs ou des voitures sans permis. Autant de véhicules qui les mènent à un tournant de leur existence. Autant de portraits qui constituent un recueil intelligemment écrit, à la frontière des genres littéraires, lançant ainsi la nouvelle collection "Court" des éditions Agullo, de la plus parfaite des façons.
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