Le Goéland de Jean BALDE aux éditions Le Festin, 19,50 euros.
Ecrit en 1924 et 1925, Le Goéland se (re)découvre dans son rythme lent qui réclame une attention soutenue surtout lorsqu'il s'engage dans les méandres psychologiques de ses personnages « envasés » dans le village d'Arès peuplé d'êtres mutiques, tournés vers la mer ou cachés dans la forêt.
Très vite le Bassin d'Arcachon fait signe par l'évidence des éclats de sa beauté. Ce Bassin omniprésent avec ses paysages si changeants enchante le roman par la paisible poésie de son espace grandiose et néanmoins accessible, un fabuleux moteur est mis en marche et fait mieux avancer l'histoire.
Cette histoire est contenue dans le personnage du jeune Michel qui a grandi chez les Picquey, une famille d'ostréiculteur dont il n'est qu'un enfant à garde placé par sa mère qui rechigne à révéler le motif de cette mise à l'écart. Entre temps, Michel est devenu un adolescent rebelle et solitaire bien qu'instruit par un abbé dont il s'est finalement affranchi.
Outre l'abbé, Michel ignore encore les doux et vibrants regards que lui lance Estelle, la jeune fille des Picquey. Seule lui manque Laure, sa mère qui lui rend visite, de rares fois, et le laisse toujours dans un état d'extrême nervosité. Elle arrive à l'improviste par le train de Bordeaux où elle vit auprès d'un mari ignorant de l'existence de Michel. Incapable d'avouer les véritables origines de son fis, Laure culpabilise et éprouve un dilemme proche de la tragédie qui sert d'intrigue au Goéland.
Voulant en finir avec les mystères et les reculades de sa mère, Michel fait le voyage à Bordeaux. Il y vit quelques mois, l'auteur délivrant au passage de saisissantes descriptions de la ville portuaire crasseuse à maints endroits et où les beautés et les richesses se dissimulent derrière les pierres noircies. Cet univers se substitue pour un temps au travail sur les parcs à huîtres.
De ce travail, Jean Balde nous en a fait auparavant un reportage précis en utilisant son vocabulaire, ses difficultés, ses craintes et ses récompenses.
Reste qu'Arcachon et ses lumières sont reléguées au loin et servent de repère un peu comme le phare du Cap-Ferret. Elles représentent une autre vie aux antipodes de celle , plus sauvage et libre, vécue à Arès. Cependant, à la fin du livre, Michel s'approche sur sa pinasse à voile de la plage Pereire et reconnaît parce qu'il est instruit, le poète italien D'Annunzio qui promène ses chiens. Il symbolise une autre forme de liberté que Jean Balde n'a pas pu s'empêcher d'évoquer.
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