La nuit pour adresse de Maud SIMONNOT, aux éditions Gallimard, 20 euros.
Il s'appelait Robert McAlmon, un américain intenable qui débarqua à Paris au début des années 20 avec l'avantage d'être millionnaire. Lui ne l'était pas vraiment mais il contracta un mariage qui lui assura de ne jamais tomber dans le besoin.
Maud Simmonot a retracé la vie et l’œuvre époustouflante de cet homme relativement inconnu avec la minutie propre aux historiens qui tiennent un sujet en or et ne manquent pas de documents.
Si Robert McAlmon est bien le personnage principal du livre, il apparaît très vite qu'une myriade de personnalités l'entoure et, de ce fait, enflamme l'imaginaire du lecteur.
Par ordre d'apparition, ou presque, William Carlos Williams, James Joyce, Sylvia Beach, Ezra Pound, Ernest Hemingway, Gertrude Stein ou encore Adrienne Monnier, Nancy Cunard, Mina Loy, Brancusi... tous et toutes, fiévreusement parisiens, accompagnèrent McAlmon dans sa quête de gloire, de fêtes et d'excès.
Ceux sont eux, les expatriés, majoritairement américains, qui ont sublimé le Paris des "années folles", Gertrude Stein les dénomma la "génération perdue".
A l'écart des français qui, pour la plupart (les surréalistes) ne les appréciaient pas, ces fêtards du monde littéraire, noctambules infatigables, s'appliquèrent à brûler leur vie par les deux bouts. On pouvait tout aussi bien les croiser un jour à Paris qui était leur QG, le lendemain en Espagne, le surlendemain sur les bords de la Riviera à peaufiner un style de vie aux accents fitzgeraldiens dont Robert McAlmon fut le porte-drapeau.
Mais au-delà des frasques alcoolisées et nocturnes, Maud Simonnot s'attache à décrire tout un pan artistique et intellectuel caractérisé par la revue Contact que McAlmon fonda depuis les Etats-Unis et qu'il transforma en maisons d'éditions à Paris. Cette activité alors l'imposa comme le chef de file de tout ce qui se publiait de résolument neuf en poésie comme en roman.
Un des épisodes les plus notoires, bien que McAlmon ne fut pas cette fois-là l'éditeur du livre, concerne la fin de l'écriture d'Ulysse de James Joyce avant sa parution en 1922.
Autre savoureux passage, la lecture des rapports entretenus entre McAlmon et Hemingway. Leur amitié et peut-être leur admiration mutuelle fut aussi chargée d'une puissante rivalité et d'une étonnante jalousie de la part d'Hemingway.
Dieu oubliera tout le monde - même Robert McAlmon écrivait justement Fitzgerald à Hemingway en 1927.
Sa mort en 1956, à l'âge de soixante ans, le laissa seul et apaisé face au désert de l'Arizona.
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