samedi 3 décembre 2016

L'archipel d'une autre vie d'Andreï MAKINE

L’archipel d’une autre vie d’Andreï MAKINE aux éditions du Seuil, 18 euros.

L’Archipel d’une autre vie nous propulse en Sibérie extrême-orientale, à Tougour, petite localité faisant face à l’archipel des Chantars. La notion de géographie est importante dans ce livre, Andreï Makine, né en Sibérie, s’applique à nous dépayser en nommant avec précision les fleuves, les îles et les villages car son histoire se niche principalement dans des lieux sans nom, le long d’une rivière affluente de l’Amour, l’Amgoun, dans la Taiga.

C’est d’ailleurs un géodésiste qui nous introduit dans cette contrée et nous instruit de sa petite histoire avant de nous rapporter celle, bien plus forte, d’un homme qu’il vit débarquer un jour par hélicoptère, un homme intrigant qu’il se décida à suivre jusque dans la forêt avant de se faire surprendre par celui-ci durant son sommeil. Cet homme, après avoir compris que le jeune géodésiste ne lui voulait aucun mal, lui conta les évènements auxquels il prit part en 1952, en tant que militaire, au moment où l’URSS préparait ses hommes à une mobilisation en Corée lorsque les Etats-Unis faisaient craindre un nouvel usage de la bombe atomique.

C’est dans ce contexte que le dénommé Gartsev commence donc son récit. Nous apprenons alors beaucoup sur l’état d’esprit des militaires de l’époque, sur l’autoritarisme guidé par une notion permanente de récompenses, de médailles et de promotions, sur le sentiment de supériorité de certains et sur celui de peur pour d’autres. Tout cela évolue soudainement lorsqu’une troupe, dont fait partie Gartsev, se met en chasse d’un évadé, échappé d’un camp de prisonniers. La traque se déroule dans cette même région de la Russie où des hommes bien armés vont en découdre avec un fugitif qui n’aura de cesse de les surprendre. 

L’archipel d’une autre vie fait irrémédiablement penser à l’atmosphère de Délivrance, le roman de James Dickey adapté au cinéma par John Boorman. La nature, omniprésente, servant de révélateur à chacun des protagonistes.  

A cet instant de ma jeunesse, le verbe « vivre » a changé de sens. Il exprimait désormais le destin de ceux qui avaient réussi à atteindre la mer des Chantars. Pour toutes les autres manières d’apparaître ici-bas, « exister » allait me suffire.


Walden ou la vie dans les bois d’Henry David Thoreau est tout autant une référence majeure à laquelle on peut spontanément penser et souligne à quel point Andreï Makine a réussi son roman qui repose sur un suspense épatant et une philosophie émouvante.               

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