On ne peut citer Jean Cayrol aujourd’hui sans parler de Nuit et brouillard (1956), le film d'Alain Resnais qui faisait suite au recueil Poèmes de la nuit et du brouillard (éditions Seghers 1946). L’oeuvre de Jean Cayrol est inscrite en lettres majuscules dans l’histoire littéraire française, hélas, au chapitre tragique de la déportation.
Jean Cayrol fut aussi un acteur essentiel de l’histoire éditoriale française où il participa à l’aventure des éditions du Seuil en découvrant notamment Philippe Sollers et Pierre Guyotat. Poète, romancier (prix Renaudot en 1947 avec Je vivrai l'amour des autres), Jean Cayrol est un écrivain que les éditions de l'Eveilleur nous encouragent à ne pas oublier en rééditant Les enfants pillards paru en 1978.
Jean Cayrol fut aussi un acteur essentiel de l’histoire éditoriale française où il participa à l’aventure des éditions du Seuil en découvrant notamment Philippe Sollers et Pierre Guyotat. Poète, romancier (prix Renaudot en 1947 avec Je vivrai l'amour des autres), Jean Cayrol est un écrivain que les éditions de l'Eveilleur nous encouragent à ne pas oublier en rééditant Les enfants pillards paru en 1978.
Jean Cayrol, donc, dont le nom n'évoque pas nécessairement l’enfance, la sienne ou celle de sa génération, se souvient de la première guerre, sans pour autant l'avoir vue. Les enfants pillards commence à Bordeaux à la fin de l’été 1918, puis s’en éloigne pour rejoindre le village de Lacanau que l’on gagnait alors par le train. Jean Cayrol, âgé de huit ans et rebaptisé, pour le livre, Jean-Baptiste, occupe les lieux avec son cousin André plus âgé. Ils forment, avec d’autres camarades, une colonie d'enfants qui rappelle immanquablement celle de Sa majesté des mouches, la cruauté en moins.
Plus qu'une occupation des lieux, il s'agirait d'une défense - nous sommes en guerre - organisée depuis une maison dominant la plage que madame Princetard, mère du cousin André, quitte aussitôt pour retourner à ses obligations bordelaises. Seule Angèle, une domestique, se chargeant des taches ménagères et des repas, demeure un repère régulier issu du monde des adultes. Les journées sont invariablement dictées par la loi de ce curieux cousin, despotique à ses heures mais aussi protecteur, patriote, frondeur, admirable par son courage et terrifiant par ses colères.
Que se passait-il alors à Lacanau en ces temps de guerre ? C’est tout l'objet du livre que porte une écriture au fort pouvoir d’enchantement. L’océan fixe les limites, ordonne le temps, amène la nouveauté, l’incertitude. Des bateaux coulent ou envoient des signaux, libèrent des tonneaux qui s’échouent sur la plage. Des hommes surgissent irresponsables, fous, hagards, toujours étranges et tenus à distance par cette bande d'enfants qui apprend, au jour le jour, sous les ordres d’André, à pêcher, monter la garde, dissimuler, éprouver une liberté trop immense, infinie comme les plages qu’ils parcourent sans cesse à la recherche d’un signe de vie qui les rendrait moins seuls.
Les enfants pillards montre ainsi l’étendue du désarroi que les populations, fixées à l’arrière, endurèrent loin des combats. Ce temps si particulier est ici constitué d’éclats consumés par l’enfance inquiète de très jeunes garçons et de très jeunes filles. Jean Baptiste n’est pas plus sûr de lui-même que les autres, cependant, son seul phare, dans la nuit de ses huit ans, se prénomme André.
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