Vera Kaplan de Laurent SAGALOVITSCH aux éditions Buchet Chastel, 13 euros.
Vera Kaplan n’existe pas, pas sous ce nom. Laurent Sagalovitsch s’est (librement) inspiré de la vie de Stella Goldschlag. Cette précision est donnée sur la quatrième de couverture.
Le roman commence par le récit du petit-fils canadien de Vera Kaplan décrivant les tours et les détours qui l’ont amené à connaître l’existence de sa grand-mère. Cette introduction singulière et habile s’appuie sur une double révélation (la mort de la mère du narrateur qui s’acharna jusqu’au bout à ne jamais parler de Vera Kaplan) et un document (une lettre du notaire annonçant la mort de Vera Kaplan «une femme en tout point fascinante »).
Puis vient l’heure d’écouter Vera Kaplan au moment où déjà elle a trop vécu. C’est à sa fille qu’elle s’adresse dans une longue lettre en ignorant si elle lui parviendra un jour. Vera Kaplan justifie sa vie, son enfance, ses parents et l’obsession de la revoir un jour. Sa fille vit en Israël mais elle ne sait pas sous quel nom.
Vera Kaplan s’y est rendue. Elle a pris un avion et, sur place, elle s’est contentée d’errer dans le hall de l’aéroport puis elle est rentrée par le premier avion pour l’Allemagne, son pays.
Incontestablement, Laurent Sagalovitsch s’est lancé un immense pari en écrivant le roman d’une femme sur qui l’opprobre est fatalement tombé lorsqu’on a jugé ceux qui commirent des crimes durant la deuxième guerre mondiale
Dans la deuxième partie du livre, Vera Kaplan est prisonnière des nazis. Ils la font impitoyablement chanter avec l’espoir de sauver la vie de ses parents. Elle saura bien plus tard qu’on l’a choisi pour sa beauté et peut-être pour sa personnalité. Dans ce qui est devenu cette fois un journal intime Vera Kaplan écrit qu’elle n’a eu d’autre choix que de trahir les siens, ce qui signifie dénoncer des juifs de Berlin tout le temps que dura la guerre. C’est ainsi que Vera Kaplan s’est sauvée de la déportation.
Autant dire que la prose de Laurent Sagalovitsch chemine sur un terrain miné et qu’il n’est pas toujours simple de saisir le périlleux projet de réhabilitation que l’auteur entreprend au sujet d’une femme à ce point confondue par l’Histoire.
Cette deuxième partie est une descente aux enfers qui incite insidieusement à comprendre ce qui à fait tenir Vera Kaplan dans cette insensée trahison.
Un historien aurait-il été mieux placé pour évoquer ce supplément de tragédie dans l’histoire de l’extermination programmée des juifs par Hitler ?
L’exercice littéraire, lui, sur un tel sujet suscite bien des débats et ce roman faisant partie des finalistes du prix auquel nous participons (ils ne sont plus que cinq), attisera sans aucun doute la délibération du jury. Nous y reviendrons.
Merci beaucoup pour cette chronique mais pourquoi diantre vous vous êtes mis en tête de m'appeler Nicolas ?!:) Vous trouvez que Sagalovitsch cela ne fait pas suffisamment russe comme cela !
RépondreSupprimerBien à vous, néanmoins et encore merci