vendredi 23 avril 2021

Mousse de Klaus Modick

Mousse de Klaus Modick aux éditions Rue de l'échiquier, 16 euros.

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Parmi toutes les études menées par le botaniste allemand Lukas Ohlburg, la mousse demeure un souvenir d'enfance, un moment partagé avec son père dans leur maison de campagne où ce dernier demandait à son fils d'écarter cette mousse qui s'incrustait entre les dalles du jardin. La mousse est un élément vivant tout à fait remarquable dont le livre nous fait comprendre l'adaptabilité. Mais il ne s'agit pas d'un livre scientifique bien que Lukas Ohlburg fût une sommité dans son domaine jusqu'à sa mort survenue en 1981.

Mousse est introduit par une note de Klaus Modick (le livre est paru en Allemagne en 1983) sur la réception du manuscrit que lui a remis le frère de Lukas Ohlburg. Le récit épars des souvenirs du botaniste est donc reconstitué par Klaus Modick en une sorte de rêverie du promeneur solitaire dans une région de l'Allemagne du Nord (non loin de Brême).

Le grand sens de l'observation de Lukas Ohlburg est probant, l'homme est à la fin de sa vie mais sa perception de la nature est toujours pourvue d'une acuité que renforce sa connaissance d'un environnement dont il peut nommer chaque élément qui le constitue. 

Il existe une petite famille de mousse formant un gazon qui ne possède qu'un seul genre, Splachnum, essentiellement limitée aux zones arctiques. Mais depuis quelques jours elle ondoie autour de la maison, ce qui est étonnant, étant donné que la chaleur et la luminosité augmentent constamment. Le petit chapeau jaune ou rouge ressemble étrangement à un signal. Voici ce qu'il en est. Avec son scintillement et l'odeur indolique qu'elle dégage, ce qui exerce sur moi  un effet à la fois stimulant et anesthésiant, cette famille de mousse commence à s'installer dans ma barbe, attire des insectes qui assurent la dissémination de ses spores. C'est tout à fait exceptionnel pour des mousses. Même dans le choix de son substrat, de son lieu d'installation, cette famille fait preuve d'une particularité sage. Elle pousse exclusivement sur des matières organiques en voie de pourrissement. De toutes les mousses celles-ci est peut-être la seule à pouvoir un jour quitter son impasse évolutive pour aller vers le royaume coloré  des plantes plus grandes.

Cette présomption que je lui accorde négligemment tandis que les températures augmentent, n'a en fin de compte aucun sens. Mais la lueur, l'essaimage, l'odeur de bleu profond, tout ce la est un véhicule dans lequel je peux poursuivre mon voyage.
 

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