samedi 2 avril 2016

Le grand marin de Catherine POULAIN

Le grand marin de Catherine POULAIN aux éditions de l'olivier, 19 euros.

A l’instar d’En attendant Bojangles d’Olivier Bourdeaut (sur le blog le 4 mars), Le grand marin de Catherine Poulain s’est fait une place de choix dans les classements des meilleures ventes de l’année 2016. Nous attendons désormais que, à lui aussi, quelque prix soit décerné. Une récompense qui serait en rapport avec le monde de la mer ou bien du voyage, des grands espaces et de l’aventure.

Mais, s’agit-il d’un roman ? d’une autobiographie ? ou d’un arrangement des deux ? Le grand marin ne tient pas à fournir de réponses faciles. L’écriture de Catherine Poulain nous saisit en quelques pages comme si la réalité devenait floue et que de nombreux repères s'étaient perdus sitôt que l’Alaska a été rejoint par Lili, héroïne au discours et à la personnalité échevelés, aussi bien fragile que déterminée dans cet univers de pêcheurs où elle trouve un travail à bord d’un bateau sur les mers démontées du Pacifique nord.

Son premier embarquement sur le Rebel est proprement sidérant. Lili n’a jamais pêché, c’est une Green, étrangère qui plus est, sans permis de travail, seule femme à exécuter les mêmes tâches que des hommes plus forts et plus résistants qui hurlent contre le vent, le repos étant ici aléatoire et même facultatif tant que du poisson est remonté à bord.   

Ces premiers jours sur le Rebel vont marquer irrémédiablement Lilli. Ses mésaventures       (chutes intempestives dans le bateau), ses blessures (elle sera évacuée suite à la piqûre dangereuse d’une arête), les rejets (parfois on l’encourage et souvent on l’engueule), ne vont qu’exacerber son désir de repartir en mer. Lili est venue en Alaska pour en finir avec la vie ennuyeuse du village français qu’elle a quitté sur un coup de tête pour Kodiak. 

Catherine Poulain scande ce vécu en une multitude de petites phrases qui ponctuent toutes les sensations de Lili notamment lors de ce périple en mer. Elle y met toute l'incompréhension de Lili à ses débuts, toute la crainte qu’elle éprouve au contact des marins, toute sa peur de périr noyée tout en considérant qu’il s’agirait de la plus belle des morts. Catherine Poulain décrit avec toute l’acuité possible la faim, la fatigue et le froid ainsi que cette volonté forcenée de Lili de surmonter les cadences infernales que la pêche exige, de son énergie surhumaine au regard de son corps plutôt frêle, seules ses mains sont larges et plus développées que celles de certains hommes.

Passée cette formidable expédition, Lili va connaître l’autre versant de la vie de pêcheur. La vie dans les bars et les rencontres qui s’y font mais aussi l’attente sur le port avant un nouvel embarquement sur un autre bateau. Lili, venue de nulle part, attise le désarroi des hommes que l’Alaska emprisonne et que la pêche transfigure. 


Souvent, le livre de Catherine Poulain atteint des sommets qui manquent cruellement à notre littérature. Nous n’avons pas assez de Jude, de Ian, de Jason, de Murphy, de Joey, de Niképhoros dans nos romans français. D’ailleurs Catherine Poulain n’a pas d’équivalent chez nous, on pense plus volontiers à Kerouac et forcément à Melville, car Catherine Poulain, avec ce Grand marin, va très haut.  

Catherine Poulain sera présente 
au Salon de La Plage aux Ecrivains des 30 Avril et 1er Mai, ne la manquez pas!


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