samedi 14 février 2015

Eva de Ersi SOTIROPOULOS

Recto Eva de Ersi SOTIROPOULOS éditons Stock, 19 euros.

 La Grèce dont on nous parle tant, peut-elle se reconnaître dans l'histoire d'une dérive nommée Eva ? La réponse est dans la question cher Watson !

Au matin du 25 décembre, Eva n'est pas encore couchée, elle marche dans les rues froides d'Athènes   poursuivant une virée nocturne entièrement passée dans une boîte de nuit.  Les divers événements qui s'y sont déroulés lui reviennent par intermittence, les rencontres bien sûr, peut-être même le début d'une histoire d'amour alors qu'elle était venue avec Nikos, son compagnon, qu'elle a perdu à un moment ou un autre de la soirée et qui   l'attend certainement dans leur appartement.  
Mais Eva ne rentre pas, elle déambule dans la ville comme si sa vie pouvait changer de direction, comme si la soirée en boîte avait fini de fragmenter sa vie et qu'elle avait besoin encore de rencontrer des gens.

C'est d'ailleurs au détour d'une rue qu'elle tombe sur Moïra, une fille aux allures de prostituée qui attend en vain son ami ? son mac ? son homme ? 
Une amitié spontanée se lie entre Eva et Moïra  à partir d'échanges simples et profonds. 
Ersi Sotiropoulos engage à cet instant, une rêverie comparable à celle de Fellini dans ses films. Les personnages s'y déploient libres de paroles et durs dans leur affrontement avec la réalité.
Recueillie dans l'appartement de Moïra qui, en fait, est une chambre d'hôtel, Eva reconnaît inopinément     le voleur qu'elle avait poursuivi un jour dans la rue et rattrapé après qu'il lui ait dérobé son portefeuille dans un transport en commun. Une sublime confession du voleur s'amorce alors à propos de ce jour décrété maudit puisqu'il engendra une flopée de mésaventures que le voleur raconte comme un mauvais rêve et qu'Eva, Moïra et quelques amis écoutent dans le cadre d'un jeu qu'ils ont nommé "vérité".

Dans ce glissement narratif   affleure un inconscient collectif qui nous parle bien évidemment de la situation grecque et du traumatisme subie par  la population lorsque l'effondrement économique du pays apparut aux yeux de tous. 
A la lecture d'Eva, tout semble déjà s'être délité. L'héroïne et son étrange psychologie sert d'étendard à toutes les pensées qui pourraient  habiter les grecs aujourd'hui. Mais, au-delà de la désillusion de tout un peuple,  demeure le sentiment qu'un jour tout soit remis à sa place et que les grecs retrouveront leur honneur.

Il y a d'ailleurs un vieil homme qui, vers la fin du roman, dans un flux continu de langage ne cesse réhabiliter la civilisation grecque. Si les fusées américaines se sont appelées Apollo, dit-il, c'est pour ne pas froisser les Dieux car les précédentes fusées s'étaient toutes détériorées, "les Dieux les avaient cramés". Albert Einstein, continue t-il, a pompé  toute sa théorie de la relativité à un illustre inconnu grec, c'est par l’intermédiaire des femmes de chambres de l'un et de l'autre que les informations sont passées.

Pendant ce temps, Eva attends indéfiniment l'arrivée de l'homme avec qui elle croit avoir vécu une histoire d'amour dans la boite de nuit. L'homme l'a rappelé quelques heures auparavant sur son portable et, pour Eva, c'est sûr, il va venir la chercher, elle va quitter l'appartement de Moïra et ses amis et commencer une autre vie...

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