vendredi 28 mai 2021

Les Scorpions du désert d’Hugo PRATT

Les Scorpions du Désert d’Hugo PRATT aux éditions Casterman, 35 Euros.

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L’œuvre du génialissime créateur de Corto Maltese est bien plus riche qu’il n’y parait et ne se réduit pas à la filiforme silhouette du marin aventurier. Cependant, à l’ouverture de cette intégrale (cinq épisodes étalés sur vingt ans (1972-1993)) l’élégance prime encore et un défilé de personnages en costume (de guerre) apparaît donnant comme une réplique magnifique au port altier de Corto Maltese. 


L’époque des Scorpions du Désert n’excède pas deux ans. De 1941 à 1942, le lieutenant Koïnsky, appartenant à un détachement d’élite de l’armée anglaise, est engagé sur le front Est-africain de la Deuxième Guerre mondiale. Cette partie du monde est tout aussi agitée que l’Europe. Les Italiens et les Anglais (avant que les Allemands ne viennent apporter leur soutien aux hommes de Mussolini) s’affrontent dans une guerre de position dans les contrées indéfinies d’Ethiopie et de Somalie. 


Koïnsky est d’origine polonaise, un dur à cuire aux objectifs mouvants. Les Scorpions du Désert rend compte des ambiguïtés de cette région du monde, de la multitude des forces présentes et parfois contradictoires, des humeurs des combattants presque tous loin de leur pays d’attache et en proie à la mélancolie et la peur de mourir. 


Rappelons qu’Hugo Pratt a vécu, jeune garçon, en Ethiopie où son père menait lui-même une carrière militaire qui s’acheva avec sa mort en captivité en 1942. Hugo Pratt avec cette Bande Dessinée évoque une part de son enfance et montre un paysage qui lui fut familier. Un décor d’aventures exceptionnel avec alliances et mésalliances qui rythment sans cesse l’histoire. 


Tous les moyens possibles sont convoqués car la guerre monopolise tout ce qui est à sa portée. Les gens bien évidemment et tout le matériel qui lui est dévolu, armes en tout genre, engins motorisés de toutes sortes, avions, bateaux, trains, camps retranchés, forts et fortins, dromadaires et surtout une collection complète d’uniformes (nous y revenons) qui esthétise le propos quand bien même les morts s’accumulent et le destin des survivants tombe en désuétude. 


Quelques valeurs subsistent malgré tout, l’honneur militaire, la patrie et la volonté de s’enrichir.

Après Corto Maltese qui officiait au début du XXème siècle, les aventures de Koïnsky ont beaucoup perdu du romantisme enchanteur de son prédécesseur mais ont gagné une narration plus orchestrée. L’espace-temps plus restreint des Scorpions du Désert donne au récit une valeur historique éblouissante sans occulter la complexité de ce qui se tramait alors. L’âme humaine y déborde du pire vers le meilleur.





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