Abderrahmane Eljarib, homme de lettres marocain, a la particularité d'être allé, à l'âge de quinze ans, au Collège Royal, et d'y avoir côtoyé Moulay Hassan, futur roi Hassan II.
Moulay et Abderrahmane font leurs études en France, ce dernier étudie l'Histoire à la Sorbonne et commence à écrire son recueil de poésies, les Elégies Barbaresques. Il s'éloigne peu à peu des possibilités d'intégrer le pouvoir marocain pour se tourner vers les arts et particulièrement la littérature. C'était sans compter sur la proclamation de l'indépendance du Maroc en 1955, qui marque le début de sa carrière diplomatique. De retour dans son pays natal, il est ainsi nommé conseiller technique au cabinet du ministre de l’Éducation Nationale, et participe à la grande réforme de 1957. Il est alors au service de Mohammed V, père de Hassan, et remarque l'empressement de ce dernier à succéder à son père. Lorsque Mohammed V meurt, Abderrahmane fait officiellement partie des personnes de confiance et proches du roi. Il devient aussi un sujet soumis aux bons vouloirs de Sa Majesté, dont le pouvoir de grâce et de disgrâce ne cessera jamais de torturer le héros de ce livre.
Envoyé à Tarfaya en qualité de "gouverneur académique", il confie: "Je feignais de recevoir avec le plus grand sérieux les directives que l'on me donnait, mais je sentais que l'on se jouait de moi."
Qui se joue de lui? En exil à Tarfaya depuis sept ans, il renonce aux bonnes grâces du roi, jusqu'au jour où on l'appelle enfin à Rabat pour obtenir un statut dont les attributs sont directement inspirés de l'époque de Louis XIV: il est nommé historiographe du royaume, à l'instar d' un certain Jean Racine. Sa mission consiste en apparence à décrire les décisions, les épreuves et les réformes vécues au cœur du pouvoir marocain. C'est aussi un statut dangereux, exposé à la disgrâce, et la moindre erreur peut être fatale.
A mesure que l'on apprend du contexte historique marocain, des relations diplomatiques avec la France, le personnage nous entraîne dans ses tourments, ses réflexions sur le pouvoir et les mises à l'épreuve de sa loyauté au roi. Un magnifique portrait d'un homme tantôt habile tantôt maladroit, en permanence dans la peau de son souverain pour ne pas lui causer de tort. Entre sens du sacrifice et grande lucidité, Abderrahmane Eliarib devra garder son sang-froid pour ne pas se laisser envahir par les rouages du pouvoir.
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