samedi 26 septembre 2015

Profession du père de Sorj CHALANDON

Profession du père de Sorj CHALANDON, aux éditions Grasset, 19 euros.

Émile dessinait et on avait eu tôt fait de l'appeler Picasso à la maison. Ce surnom venait de son père bien sûr, qui le surveillait comme il surveillait tout le monde dans une ville de province (Châteauroux ?) où il croyait pouvoir changer l'Histoire.

Émile n'avait que le dessin pour s'échapper, pour échapper à son univers oppressant de jeune garçon destiné au rôle que lui avait attribué son père. Un rôle d'espion dans la France d'après la guerre d'Algérie quand certains français soutenaient le mouvement OAS et œuvraient pour le Général Salan et le retour de la France dans son ancienne colonie.

Bref, Émile, second de son père, avait du pain sur la planche. Chaque soir, il fallait éteindre les lumières et regarder dans la rue si rien de louche ne se produisait, écouter la radio quand le Général de Gaulle s'exprimait et subir les vociférations du père à l'encontre du "traître".
"Tu connais ton père" disait sa mère, antienne qu'Emile entendra jusqu'à la fin car la mère du petit Émile subissait tout autant le régime plénipotentiaire de son mari et ne comprenait goutte aux idées de ce dernier. Avait -elle vu le fameux Ted, l'ami américain, agent de la CIA qui pilotait de loin l'avenir d'Emile ?

" Ted sera déçu", "Ted sera content", "Ted te regarde", "C'est de la part de Ted" etc. Ted fut une couverture permanente pour le père, invisible mais toujours présent, il permit l'authentification de tout ce que le père ordonnait et qui intoxiquait Émile au point qu'il fût au bord de commettre l'irréparable lorsque, de son côté, il enrôla un copain de classe dans sa lutte secrète pour l'Algérie française.

Les années passaient, Émile dessinait toujours et comprenait de mieux en mieux combien il était aux prises avec deux êtres perdus ou plutôt coincés dans un mode de vie qui n'évoluerait plus jamais pour la raison simple que ce père n'était pas l'homme qu'il pensait être et que cette mère ne s'opposa jamais au délire continu qui s'était mis en place dans le foyer. Problème pour Émile, il s'agissait de ses parents.

Ce roman qui mêle à foison drame et comédie est incroyablement vrai, Sorj Chalandon gardait en lui cette histoire qui est la sienne. Cela n'apparaît jamais explicitement dans le livre mais il en ressort une force romanesque incontestable.

Il faut lire Profession du père jusqu'à son dernier chapitre, c'est indispensable pour saisir la grande farce de la vie telle qu'elle a été vécue par l'auteur.

samedi 19 septembre 2015

Festival Thriller de Gujan-Mestras

Ludovic Albar, Jean-Luc Aubarbier, Jean-Claude Bartoll, Nathalie Bernard, Morgane Caussarieu,
Bernard Cazaubon, David Coulon, Jean-Louis Farvacque, Olivier Gechter, Isabelle Hermelin
Raymond Khoury, Michel Koeniguer, Eric Loutte, Alain Poirrier
Pascal Regnauld et Patrice Vergès

vous retrouveront pour le plus grand plaisir de tous
sur le Port de Larros à Gujan-Mestras les 26 - 27 septembre
pour 2 jours de mystères et d'angoisses
lors du FESTIVAL THRILLERS!

Du conte musical pour les plus jeunes aux forums de discussion sur l'écriture 
pour les moins jeunes en passant par un BD concert, 
un récital de piano façon Thriller et une lecture théâtralisée,
toutes les conditions sont réunies pour passer des moments conviviaux!



Inventaire


ATTENTION!
En cette fin septembre la librairie va se plier à l'un de ses exercices préférés: l'inventaire!
Pour passer en revue, un à un, nos quelques 10 000 titres et 12 000 volumes de livres 
et, entre autres, nos quelques 200 feuilles de Canson et nombreux stylos en papeterie, 
nous devons fermer la librairie:
- LUNDI 28 SEPTEMBRE la journée
- MARDI 29 SEPTEMBRE la journée
- MERCREDI 30 SEPTEMBRE le matin

Réouverture MERCREDI 30 SEPTEMBRE à 14h30!

Nous vous invitons à prendre vos précautions cette semaine pour venir passer ou retirer vos commandes avant fermeture.

Un amour impossible de Christine ANGOT

Un amour impossible de Christine ANGOT aux éditions Flammarion, 18 euros.

Christine Angot est, aujourd'hui plus que jamais, dépositaire d'un genre (mal?) nommé autofiction. Si on attribue la paternité du genre à Serge Dubrovsky (voir son livre Le monstre), Christine Angot a rendu celui-ci familier et l'a peut-être banalisé tout en parvenant à hisser tout nouveau roman de sa plume vers un événement énervant voire exaspérant mais toujours doté d'un impressionnant engagement pour la littérature. D'ailleurs, ses détracteurs les plus acharnés ont, pour la plupart et pour cette raison, déposé les armes. 

Christine Angot, de ce fait, rejoint Michel Houellebecq dans la sphère des écrivains devenus intouchables et que rien ne peut plus atteindre. Elle est devenue une sorte de marque déposée, un gage de qualité aimé (ou détesté).

Un amour impossible reprend par le menu l'histoire d'amour de ses parents qui a surgi dans les années cinquante à la manière d'une romance inédite et en avance sur son temps. Les deux tourtereaux ne se marieront jamais à la demande de Pierre, l'amant qui acceptera néanmoins un enfant de Rachel, sa maîtresse. Cet enfant naît à Châteauroux alors que Pierre continue de mener une vie à distance qu'il décrit par lettres comme très occupée et même préoccupée.
L'enfant, c'est Christine, évidemment, petite fille vulnérable, emplie d'amour, que sa mère éduque joyeusement, surpassant les attentes, les craintes et les pleurs que lui inflige Pierre à force de revirements, d'échappées et de lettres cruelles. 

Cette histoire, qui par instants prend les accents d'un film de Claude Lelouch, en raison peut-être de la fraîcheur de ses dialogues, nous transporte dans une France provinciale et dans un rapport au temps qui passe entre mère et fille.

Ce travail-là est une réussite. Aux sentiments « fusionnels » de l'enfance succèdent les déchirements de l'adolescence puis le stade inquiétant de l'indifférence qui naît à l'âge adulte. 
Toute la douleur et la rancœur qui circulent alors se justifient à l'annonce du mal fait à Christine par son père. La courte phrase qui en fait la révélation avait été développée en son entier dans Une semaine de vacances. Cette phrase contamine d'un seul coup toutes les pages qui vont suivre. Le père réapparaît dans l'histoire comme un fantôme maléfique tandis que la mère affronte les coups moraux assénés par sa fille. 

Si un apaisement s'installe à la fin du livre, c'est au terme d'un affrontement psychologique  éprouvant, encore et toujours renforcé par les dialogues entre Christine Angot et sa mère. Des dialogues que l'on pouvait trouver très simples au début et qui deviennent impitoyables à la fin. Du Angot.

Le chat du rabbin tome 6

Le chat du rabbin tome 6, Tu n'auras pas d'autre dieu que moi de Joann Sfar, éditions Dargaud, 12.99 euros

C'est avec un réel plaisir que nous retrouvons le truculent chat gris aux grandes oreilles doté de paroles.
Zlabya sa maîtresse adorée est enceinte et va bientôt accoucher. Cette contrariante nouvelle est à l'origine du questionnement de notre chat philosophe sur sa place auprès de sa tendre aimée, de son statut de chat parlant, du pouvoir des mots...
"Peut-être qu'un jour il [le futur bébé] aura un chien pour son anniversaire. Ces idiots d'enfants : ils aiment les chiens. Je ne veux pas vivre ça. J'aime les choses comme elles sont. Si tout doit changer autant s'en aller."
Ainsi par la déambulation du chat à travers la ville auprès de son ancien maître, en compagnie d'une souris ou seul, Joann Sfar aborde et interroge les thématiques de l'existence humaine telles que le secret, la religion, la foi, la vérité, la place de chacun dans la famille, le groupe...

samedi 12 septembre 2015

Et voici le programme du Festival Thriller de Gujan-Mestras!



Et pour suivre au jour le jour le festival: Facebook Festival Thriller

La saison des bijoux d'Eric Holder

La saison des bijoux d'Eric HOLDER aux éditions du Seuil, 18,50 Euros.

Depuis quelques livres déjà - depuis son installation il y a une dizaine d'années ou plus dans ce qu'il a joliment nommé "De loin, on dirait une île" - Eric Holder publie régulièrement des romans "médocains". Ces chroniques des gens d'ici (ou presque) dans lesquelles l'écrivain s'est souvent mis en scène ont toujours suscité la curiosité.
L'auteur consacré et néanmoins atypique dans le paysage - cette fois littéraire - français a su conserver la sympathie d'un lectorat sensible à ses personnages, notamment féminins, qu'il dépeint avec tendresse, humour et un attachement qui continue de le distinguer des générations advenues depuis sa propre émergence au milieu des années quatre-vingt.

Cette fois-ci encore, La saison des bijoux s'est fait remarquer avec l'épisode jugé incongru par quelques critiques, au sujet du personnage de Jeanne dont le passé tourmenté et dévoyé obligea son compagnon et désormais mari, Bruno, à l'attacher dans une cave pour la "désintoxiquer" des pulsions qu'elle avait contractées en empruntant malgré elle le tragique chemin de la prostitution. Voilà donc ce qui offusqua les juges du pouvoir de l'imagination mais nous sommes là très loin du projet d'Eric Holder même si l'épisode en question est central pour appréhender l'atmosphère régnante au cœur du roman.

Carri est une station balnéaire entre Soulac et Lacanau. Un marché florissant s'y installe à la belle saison, appelée aussi celle des touristes. Jeanne et Bruno y accèdent pour la première fois pour y vendre des bijoux, ils ne connaissent personne mais ne tarderont pas à rencontrer le "tenancier" du cru, Clergeaud, qui régente les affaires locales. "Parrain" incontournable, Clergeaud est le "protecteur" du marché de Carri et s'assure, de ce fait, que chacun paie bien les services de sa protection.
Ainsi est posée la problématique des marchés de plein air tenus à maints endroits par quelques personnes du même acabit et dont bon nombre de marchands sont bien obligés de s'accommoder.

Eric Holder s'attache à nous montrer cette part humaine présente autour des tréteaux et des remorques, des camions et des fourgonnettes qui le temps d'une grande matinée étalent les produits les plus variés dans le bruit et aussi la fureur régie par l'argent.

La saison des bijoux est une reconstitution fantastique de ce monde aux frontières de la marginalité et de la clandestinité. La galerie de portraits aussi importante soit-elle ménage une intrigue assez noire mais les gens heureux chez Holder sont omniprésents et vivent pleinement leur rencontre avec l'océan, le sable et la forêt dont l'auteur est, avec évidence, un très grand amoureux.

Le grand match de Fred Bernard et Jean-François Martin

Le grand match de Fred Bernard et Jean-François Martin, éditions Albin Michel jeunesse, 13.90 euros (à partir de 7 ans)

Ce soir c'est le grand soir, celui du match de rugby tant attendu. Aucun bruit dans les rues, tout le monde est devant son poste de télévision. Aucun bruit dans le stade malgré la foule car c'est bien plus qu'un simple match de rugby qui va se jouer, c'est une révolte contre l'oppression. Ce soir c'est le match contre l'équipe du gouvernement, les Aigles Frères, sous le regard attentif des hauts gradés et du Guide. Dès l'ouverture la tension monte d'un cran quand, malgré les représailles dont on les a menacé, l'équipe de Volodia lance "Vive le sport!" au lieu du slogan dicté "Notre guide, notre terre, notre sang!". S'ensuit un match où aucun joueur ne lâche rien. La lutte est rude mais la foule s'agite, hurle, l'espoir renaît au rythme des essais marqués par son équipe. A la mi-temps le Guide descend lui-même dans les vestiaires et la sentence tombe: "Si vous ne perdez pas, vous serez exécutés." Perdre et accepter? Gagner et mourir? 
Cet album fait partie des albums qui marquent. Prenant par son rythme cadencé qui en fait un vrai compte rendu de match, prenant aussi par l'histoire et la force qui s'en dégagent.
Les auteurs ont d'ailleurs eu l'excellente idée de terminer l'album en rappelant les principaux événements où Sport et Histoire ne faisaient plus qu'un comme les JO de 1936 à Berlin.

Le piano oriental de Zeina Abirached

Le piano oriental de Zeina Abirached, éditions Casterman, 22 euros

 Zeina Abirached est née à Beyrouth en 1981. Dans mourir, partir, revenir ; le jeu des hirondelles sorti en 2007 chez Cambourakis, elle nous narrait son enfance au 38 de la rue Youssef Semaani. Son dernier roman graphique, Le piano oriental sorti le 2 septembre, nous conte l'histoire d'Abdallah Kamanji pianiste amateur passionné qui inventa le fameux piano aux sonorités orientales - en effet dans la musique orientale le plus petit intervalle est d'un quart de ton alors que sur le clavier du piano classique il est d'un demi ton entre deux touches. 
Tout en nuances et poésie, Zeina Abirached met en parallèle l'histoire de son illustre arrière grand-père et la sienne: son arrivée en France et son intégration. La musicalité des langues française et arabe se mêle ainsi aux sonorités du piano.

samedi 5 septembre 2015

Festival Thriller de Gujan-Mestras


Pour découvrir le programme il va vous falloir attendre encore un peu.... suspense.....!

La cache de Christophe BOLTANSKI

La cache de Christophe BOLTANSKI aux éditions Stock, 20 euros

Nous sommes d'accord, il faut un peu de temps pour comprendre qui, "chez les Boltanski", est le père, l'oncle, le grand-père voire la grand-mère de Christophe.
L'appartement lui-même n'est pas, au premier abord, très facile à imaginer. Pourtant, au fil des déambulations et au gré des souvenirs de l'auteur, mouvements et paroles de la lignée Boltanski finissent par frapper le lecteur et on est sidéré d'apprendre comment cette famille - à partir de quoi - nous devient si sympathique bien qu'on la sente toujours un peu éloignée, étrangère et étrange à nous-même.

Christophe Boltanski est celui à qui, semble t-il, il incombe d'en raconter l'histoire ou plutôt de mener l'enquête car beaucoup de trous se sont insérés depuis Odessa d'où les Boltanski sont arrivés avant d'investir l'immeuble parisien de la rue de Grenelle. 
Un médecin, une écrivain, un sociologue, un plasticien, tous de premier ordre, entrent de plain-pied dans la vie de cet appartement qui s'étire sur plus de cinquante ou soixante-dix ans peut-être, car tout est un peu flou dans cette histoire nimbée des souvenirs intimes et le plus souvent d'enfance de Christophe.

Seul point infailliblement ancré dans l'Histoire, la fameuse cache où se terra Etienne Boltanski, le grand-père, sous les ordres de Marie-Elise sa femme. 
Cela s'est passé en 1942, Etienne était menacé par l'un de ses voisins d'être dénoncé en tant que juif bien qu'il se soit converti des années auparavant au catholicisme après être ressorti vivant du carnage de la première guerre mondiale.

Si Etienne est un peu le héros de cette saga, celui autour duquel tourne le livre dans son ensemble, Marie-Elise en est l'axe principal, le personnage le plus romanesque, celui qui se déplace dans l'appartement de la rue de Grenelle avec le lourd handicap d'une partie de son corps qui est devenu paralysé. Marie-Elise rayonne et gouverne entourée de ses enfants puis de ses petits-enfants qui forment autour d'elle cette formidable famille des Boltanski dont on voit de mieux en mieux les contours sensibles et les liens puissants qui en ont fait un clan comme il en existe partout ailleurs et c'est en cela que l'on est reconnaissant à Christophe Boltanski de nous en avoir fourni les clés, les lourds secrets et un formidable hommage qui tend vers l'émerveillement. 

Capitaine Papy de Benji Davies

Capitaine Papy de Benji Davies, éditions Milan, 11.90 euros, 3/6 ans
Tim est un petit garçon qui adore passer du temps avec son papy d'autant plus que celui-ci est un véritable aventurier qui est allé aux quatre coins du monde! Tous ses souvenirs rapportés des lointaines contrées sont d'ailleurs entassés dans le grenier au fond duquel une grosse porte en acier est cachée sous un drap: aujourd'hui Papy a décidé de faire découvrir à Tim ce qui se cache derrière.... et hop! les voici sur le pont d'un immense paquebot prêt à prendre la mer! Après des milles et des milles parcourus, une terre se profile enfin à l'horizon: l'aventure ne fait que commencer! Mais cette terre au doux air de jungle flamboyante est  le coin de paradis où papy va vouloir rester pour toujours, laissant Tim repartir seul le coeur lourd car son papy va beaucoup lui manquer mais au moins il sait que celui-ci est heureux et serein là où il est.
" Un beau livre, très réconfortant, qui montre combien ceux que l'on aime restent proches, même quand ils ont dû partir... très loin."

Titeuf tome 14

Titeuf Bienvenue en adolescence! Tome 14 de ZEP, éditions Glénat, 9.99 euros

C'est la rentrée, pas de panique : Titeuf est de retour. Trois ans qu'on l'attendait!
Titeuf a désormais deux amoureuses: Nadia, sa chérie de toujours, et Ramatou rencontrée dans le tome 13: à la folie! Mais comment choisir?
D'abord Titeuf doit trouver une solution pour grandir et vite comme le lui ont intimé les filles. Pourquoi ne pas essayer "la testostérole" autrement dit "l'engrais à poils de slip"?
Mais l'adolescence du point de vue de Titeuf et ses copains fait un peu peur, surtout après avoir observé les allées et venues des ados du lycée Thébault, ceux-là mêmes qui "se lèchent les bouches".
Dans Bienvenue en adolescence ! et contrairement aux albums précédents, Zep nous conte une longue histoire et non plus une succession de gags. Cet album tant attendu des fans de Zep ne manquera pas de leur plaire et devrait réjouir un large public!