Oh … de Philippe Djian aux éditions Gallimard 18,50€
Chaque sortie d’un livre de Philippe Djian est un petit évènement. Sorte d’icône de la littérature depuis l’énorme succès de 37°2 le matin, le parolier de Stéphane Eicher a ses inconditionnels.
Alors qu’il aurait pu exploiter un filon très lucratif, il a pris le parti de la littérature pour bâtir depuis des années une oeuvre singulière et tracer son sillon.
Son dernier roman, dans la lignée de ses précédents, nous décrit un univers très sombre, encore plus peut-être, que d’habitude.
On comprend très vite que la narratrice, Michèle, vient de se faire violer. Elle va néanmoins continuer de coucher avec son violeur. Par ailleurs, elle a comme amant le mari de sa meilleure amie, sa mère de 75 ans ne sort qu’avec des hommes trois fois plus jeunes qu’elle et son père est en prison depuis des années après avoir massacré des enfants dans un club.
Bref malgré ce tableau apocalyptique P.Djian fait le superbe portrait d’une femme d’aujourd’hui. Dans une excellente interview accordée au magazine les inrockuptibles Djian déclare : « Dans la vie, on n’est jamais loin de basculer ». L’auteur décrit très bien ce moment ou les vies dévissent. A la fin du livre la narratrice nous donne une clé : « Au fond, je ne pensais pas être une personne si étrange, si compliquée, à la fois si forte et si faible. C’est surprenant. L’expérience de la solitude, du temps qui passe est surprenante. L’expérience de soi. De plus hardies ont vacillé-et j’ai fais plus que vaciller, c’est entendu ».
Livre politiquement incorrect mais la littérature n’est pas la pour nous servir la soupe , OH… est écrit d’une traite sans chapitre. D’un style très pur, sobre voir un peu clinique le dernier livre de P.Djian est d’une lumineuse noirceur. L’auteur possède cette qualité réservée aux vrais écrivains qui est de savoir créer une atmosphère, un climat.
Il devrait participer à la course aux prix. Aura-t-il quelque chose ? Rien n’est moins sûr tant il est vrai que les tractations entre éditeurs font parfois passer les qualités littéraires au second plan. Ce qui est sûr c’est que beaucoup de livres primés par le passé n’ont pas les qualités de celui-ci. A suivre…
Pour finir, citons un autre extrait de l’interview et n’oublions pas ce précieux rappel de P.Djian, biarrot d’adoption : « Lire, ce n’est pas une promenade. On n’est pas en train de rigoler. La littérature est un truc sérieux car elle change notre vie » . Ceci étant dit, bonne lecture !
Olivier de Marc